Histoire
Vous l’aimerez quand même
C’était un été chaud pour la Russie. Natasha peinait à donner naissance à son enfant. Mais elle trouvait encore et toujours un regain d’énergie lorsque ses forces semblaient la quitter.
– Madame Belinski… il serait judicieux d’appeler le médi…– NON !Et c’est en poussant ce cris que celui de son bébé retentit à son tour. La nouvellement mère explosa en sanglot alors que son enfant était posée sur sa poitrine.
– Alors ?La voix de Yakov, son époux, retentit dans la pièce. Aucune douceur dans sa voix, juste une envie puissante de savoir si sa femme avait réussi à faire son seul devoir : lui donner un héritier russe.
Toute la salle se tut, et seul des petits gazouillis remplissait la pièce tendu d’un air joyeux.
– Alors ? Répondez moi Natasha.
– Je l’aime. Et vous l’aimerez aussi.Dans un grognement, Yakov quitta la pièce, les poings fermés, les dents serrés.
Le médicomage lui avait promis que c’était un garçon.
Il en était à 89% sûr.
Et lui était à 100% sûr que cet erreur allait mettre fin à sa carrière.
It’s happening again
– Madame Belinski… ils serait judicieux d’appeler le médi…– NON !Et tout comme 4 ans auparavant, ce cris sonna la naissance d’un enfant. Les larmes coulaient, la respiration se faisait trop rapide. Mais le bébé ne criait pas. Il ne bougeait pas.
– Qu’est-ce qu’il se passe ?Personne ne lui répondait. Le médicomage fut appelé. Plusieurs potions et sorts administraient au nourrisson. Jusqu’à ce que toute l’équipe médical abaisse enfin les épaules.
– Il est vivant. Et il ira bien.Ce fut ce moment que Yakov choisit pour rejoindre sa femme dans la pièce.
– Vous avez dit il ?– Oui monsieur c’est un garçon.Le sourir qu’il afficha sur son visage fut le plus beau que Natasha n’ait jamais vu. Elle avait enfin réussi à lui donner un fils.
Mais quelque chose clochait, elle le sentait. Mais qui était-elle pour dire que quelque chose allait mal avec son fils ? Le médicomage était certain que le petit Alexei irait bien.
The curseAnastasia s’approchait à tâtons du berceau de son petit frère. Elle ne l’avait pas encore vu, on lui interdisait. Mère disait qu’elle ne pouvait pas approcher car elle pouvait le contaminer. Mais Anastasia, du haut de ses 4 ans, voulait voir le petit être qui accaparait l’attention de sa mère.
Doucement, elle posa ses petites mains sur le bord du berceau, se mit sur la pointe des pieds et se pencha au-dessus du petit lit.
Là, enveloppé dans des couvertures de coton blanc, s’étendait Alexei.
Blanc.
Livide.
Sa poitrine ne se soulevait plus. Pourtant, il semblait dormir, paisiblement. Avec la délicatesse qu’une enfant de 4 ans puisse avoir, elle murmura le prénom de son frère. Il ne broncha pas. Elle se mit à faire tanguer légèrement le berceau. Rien ne se passa. Elle posa ses doigts sur la peau froide du nourrisson pour le secouer légèrement. Rien. Rien qu’une enveloppe froide sans vie.
– ÉLOIGNE TOI IMMÉDIATEMENT !Natasha courut vers son fils. Quelque chose d’inexplicable l’avait réveillé. Une sensation de mal-être, une envie de vomir, un cri dans son rêve et le silence complet. Un silence malaisant qui serre la poitrine et vous prend à la gorge.
Dans ses bras, son fils, inerte, était déjà parti loin.
– Je t’avais dit de ne pas t’approcher ! Tu n’écoutes donc rien ! Regarde ce que tu as fais !Pour la première fois, Anastasia reçut une gifle. Suivit d’une seconde. Et d’une troisième. Elle ne bougeait pas. Elle savait que c’était sa faute. Qu’elle les méritait. Ses petites joues rougissaient. Les larmes lui montaient aux yeux.
Plus tard, Natasha s’en voudrait. Elle apprendra que son fils était mort d’un AVC.
Mais ce soir, tout ce qui lui permettait de rester debout était de gifler celle qu’elle considérait coupable.
Dream– Magnifique mademoiselle Anastasia. Vraiment superbe.Du haut de ses 6 ans, Anastasia montrait déjà des aptitudes plus que prometteuse en musique. Son instrument de prédilection : le piano. Entre ses cours d’histoire de la magie, de bienséance, de couture, de maintien, elle avait le droit à cinq heure de cours de piano par semaine. Toujours avec son professeur particulier.
– Merci beaucoup madame Kosov.– Et si vous jouiez pour votre mère ?
– Elle ne voudra pas. Elle ne m’aime pas.La professeur se figea en entendant les mots de la fillette. Elle savait qu’elle ne pouvait rien dire. Elle n’avait vu madame Bilinski qu’une seule fois lors de l’entretien. Elle ne venait jamais voir sa fille jouer. Ne s’intéressait jamais de sa progression.
– Mais peut-être que miss Irina voudrait-elle ?Sourire aux lèvres, la professeur alla chercher la dame de compagnie de Madame Belinski, qui les rejoignit à cœur joie pour entendre sa petite protégée jouer.
Parfois, tard le soir, Anastasia se mettait à rêver. Elle rêvait que sa maman soit Irinia. Qu’elle lui apprenne à cuisiner des babkas au chocolat. Qu’elle l’emmène loin à travers les champs pour ne plus jamais revenir ici.
Dans l’entrebâillement de la porte, cachait dans l’ombre, se tenait Natasha. Elle avait tout essayé pour se rapprocher de sa fille, mais rien n’y faisait. Lorsque la petite posait son regard bleu sur elle, tout ce qu’elle voyait était le corps d’Alexei et elle, penchait sur le corps inerte de son fils.
– Irina. Je ne vous paie pas pour que vous regardiez ma fille jouer. Venez donc.
Et, ce fut avec un regard triste que la jeune Anastasia vit sa mère se retourner sans un seul compliment à son égard.
Wasting my young year
Du haut de ses 10 ans, bientôt 11, Anastasia observait avec fascination les orchidées de sa mère. Elle n’avait, bien évidemment, pas le droit de les toucher. Alors, à la place, lorsque Madame Belinski ne se trouvait pas dans les parages, elle les peignait. Elle avait demandé à Irina de lui acheter un petit carnet à aquarelle avec de jolis couleurs et des pinceaux. Les dessins n’étaient pas fameux, mais, au fur et à mesure des semaines, la petite s’améliorer.
– Tu vois Lena, ça, c’est une PHALAENOPSIS, ou une orchidée papillon. Elle est jolie n’est-ce pas ? Mais ma préféré reste la Ophrys apifera. On dirait une abeille regarde !C’était avec une certaine fierté qu’Anastasia montrait ses aquarelles à sa sœur. Sœur de cœur et non sœur de sang, pour elle, elle avait enfin trouvé ce qui lui manquait en elle et Irina : une famille.
– Bon, et si on allait dans le petit salon pour que tu me montres tes gammes ? J’espère que tu…La porte s’ouvrit en grand sur une Natasha livide, froide. Elle posa son regard sur Lana, puis un autre, plus dur, sur sa fille.
– Il est temps pour Lana de partir. Et pour toi de réviser plutôt que de t’amuser à ruiner mes orchidées.Hochant docilement la tête, Anastasia prit délicatement la main de Lana pour la tirer vers la sortie où l’attendait sa mère. Elle prit sa petite sœur dans ses bras et murmura :
on se voit la semaine prochaine.Mais il n’eut pas de semaine prochaine.
Lana ne revint jamais montrer ses gammes à Anastasia.
Et Irina ne lui apprendrait jamais à cuisiner une babka au chocolat.
The english affair
20 décembre 1972.
Nous sommes heureux de vous annoncer les fiançailles de Darell Warwik, fils d’Andrew Warwick, et d’Anastasia Belinski, fille de Yakov Belinski.
Le mariage aura lieu le 21 juin 1973 à Londres.Voici la lettre qu’Anastasia reçut par hibou en cette matinée glacée de décembre, assise sur les bancs des réfectoire de Durmstrang. Les trois fourrures qu’elle portait autour d’elle ne lui permettait plus d’avoir chaud. Elle était frigorifiée jusqu’aux os. Son cœur battait plus lentement – ou plus vite ? Elle ne saurait dire.
– Ana, tout va bien ? C’est quoi montre !
Elle laissa sa voisine de table prendre l’invitation aux lettres dorés. Elle couinait d’excitation, lui piaillait aux oreilles. Bientôt, toute sa tablée était au courant qu’elle allait épouser un Warwick.
Ils ne l’avaient même pas prévenu.
Elle ne l’avait même pas averti.
Tout ce que Natasha Belinski voulait, c’était de se débarrasser de sa fille, de l’envoyer le plus loin possible d’elle. Voilà ce dont Anastasia était persuadée.
Mais comme toujours, elle obtempérait.
Elle était obligée.
Après tout, c’était sa faute si son père n’avait pas d’héritier, et que sa mère n’était plus aimé.
Dear– Elle est magnifique.Tenant sa fille dans ses bras, Anastasia se promit de l’aimer plus que sa propre vie. Elle était minuscule, bien trop petite. Elle lui avait donné naissance à 7 mois de grossesse, et elle savait pertinemment que Sofia Jullia Warwick devrait se battre pour rester en vie.
– Ma зайка (se prononce zaïka, signifie mon petit lièvre) … tu es forte. Comme ta mère. Comme ton père. Tu vivras. Et je t’aimerai plus fort que n’importe qu’elle mère. Je serai toujours à tes côtés, je te le promets. Une larme perla sur la joue de la nouvelle mère. Elle était effrayée. Elle n’avait que 20 ans, et était seule dans un pays qu’elle ne connaissait pas depuis seulement neuf mois.
Non, elle n’était plus seule.
Elle avait Sofia à partir de maintenant.
Et son mari, qui la regardait avec tendresse alors que leur fille lui attrapait le doigts.
Elle se créait une nouvelle famille.
Tout irait bien.
Can’t catch me nowElle se savait chanceuse.
Elle vivait dans une demeure magnifique.
Elle portait les plus grands couturiers du monde sorcier.
Elle avait un atelier rien qu’à elle, des peintures superbes, des orchidées rarissimes.
Elle avait une fille parfaite.
Une vie parfaite.
Et pourtant, ses doigts pianotaient avec rage alors qu’elle entamait les quatre saisons de Vivaldi. La tempête faisait rage, autant sur les touches d’ivoire que dans son cœur et son corps.
Elle laissa son corps s’exprimer, la musique emportait tous les maux qu’elle ne pouvait exprimer. Toute la douleur qu’elle ne pouvait hurler.
Il n’était pas le pire des maris.
Elle se savait chanceuse.
Lorsque qu’elle laissa s’envoler la dernière note, Anastasia entendit les petits pas de Sofia s’avancer vers elle.
– Maman tu pleures ?– Non, non ne t’en fais pas. Elle se mit sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur sa joue, ce qui fit grimacer la russe. Il l’avait touché à cet endroit hier avec sa ceinture.
– Maman ça va ?– Oui ma zaïka ne t’en fait pas. Tout va bien. Tout ira bien. Va te préparer ma chérie, on ne veut pas être en retard au ministère ton papa serait fâché.– Oh je ne veux pas qu’il se fâche il crie tout le temps après et toi tu…– Moi rien mon ange. Tu te souviens ce qu’on a dit ?– Je ne dois rien dire.
– Voilà. C’est un secret de famille. Maintenant va mettre ta jolie robe.Sofia quitta la pièce alors que sa mère s’avança vers le miroir le plus proche. D’un murmure, elle annula le sortilège qui camouflait ses bleus et ses plaies.
Étrangement, les gifles de sa mère lui manquaient presque.
- Chronologie:
Chronologie :
15 juillet 1954 : naissance d’Anastasia après 4 ans d’essai bébé
13 mars 1958 : petit frère, mais ne vit que 3 jours
1958 : naissance de Lena, qu’elle considerera dès lors comme sa petite sœur
20 août 1965 : rentrée à Koldovstoretz qui se passe bien
1965 – 1973 : scolarité terminé, fort attrait pour la botanique et les arts
20 décembre 1972 : fiançailles à un homme plus jeune qu’elle de 25 ans : fils Andrew Warwick : Darrel Warwick, petit frère d’Ethan Warwick
21 juin 1973 : grand mariage en Grande Bretagne
2 juillet 1973 : apprend sa grossesse
5 février 1974 : naissance prématurée de leur fille à 7 mois : Sofia Jullia Warwick (ajd : 8 ans)
Juin 74 – mars 82 : se fait régulièrement battre par son mari. Se réfugit dans la musique (piano) et la peinture d’orchidée, la fleur favorite de sa mère car celle-ci lui manque
31 mars 82 : fuite avec Cassian et Sofia lors de l’attentat